07 juin 2023
SOS SOUNDS par Joachim Caffonnette
Je prends l’initiative personnelle de raconter un peu l’histoire de l’année écoulée et de pourquoi le Sounds Jazz Club est aujourd’hui en difficulté avec des mots qui n’engagent que moi.
Ce projet, c’est un vieux rêve, à côté du plaisir et de ma passion de musicien — un métier que j’ai choisi de faire à l’âge de 15 ans — j’ai toujours voulu accueillir les gens dans un lieu où ils se sentiraient bien, et proposer des concerts de qualité avec une véritable vision artistique où la seule constante serait la créativité, la passion et l’excellence des artistes sur scène.
Ne pas devoir être a la mode ou répondre à des réalités purement commerciales, défendre un projet avec ma vision et mon expérience de musicien professionnel, donner leur chance aux projets moins “bankables”.
Alors, quand fin 2020 j’ai reçu un coup de téléphone du collectif qui était en charge de l’exploitation du club mythique où j’avais passé tant de temps sur scène et dans le public, c’était comme si les étoiles s’alignaient.
Ce rêve, je le partageais depuis un moment avec mon ami Emmanuel André, et c’est tout naturellement qu’il s’est intégré au projet, tout comme Fanny DeMarco qui connaissait le lieu et le milieu par cœur.
À trois on a lancé cette reprise en collaboration avec le collectif Buen Vivir, gestionnaire du bâtiment. Malgré les moment d’errement, les erreurs, la pression constante et les conflits qu’une telle entreprise demande et génère inévitablement, nous avons tenu une première saison grâce à une réussite publique quasi totale, une solidarité matérialisée par un crowdfunding réussi au delà de toute espérance et pas mal d’aides publiques levées.
À la fin de cette première saison, nous étions tous les trois complètement sur les rotules, sans compter le cambriolage du matériel vidéo ne nous appartenant pas, ce qui n’a pas aidé à remonter le moral des troupes.
Même si nous avions maintenu le navire à flot, nous ne nous payons presque pas et les réserves énergétiques de chacun étaient épuisées, tout comme le fond de roulement du club.
Fanny a donc pris la décision de quitter le projet ne pouvant pas se permettre de travailler si dur bénévolement et Emmanuel à aussi été forcé de limiter le temps qu’il pouvait y consacrer.
Par la force des choses, parce que finalement ça reste un projet auquel je tiens énormément, je me suis retrouvé à prendre en main encore plus de choses qu’auparavant avec peu de temps, une rémunération anecdotique et aucune expérience dans certains domaines.
En début de saison, on a engagé une aide administrative sensée nous aider aussi dans la recherche de fonds publics.
Il s’est avéré après 6 mois que les compétences de cette personne n’étaient pas en adéquation avec ce que son curriculum vitae indiquait et qu’elle avait fait un travail totalement bâclé dans une période où nos finances étaient déjà fragiles.
J’ai défendu bec et ongles la politique de rémunération juste des musicien.nes tant que j’ai pu, j’ai été passé des nuits derrière le bar en plus du reste, j’ai fait face à des dizaines de problème humains, de pressions, de musiciens frustrés de ne pas être programmés, d’employés malades, de problèmes de livraison, de fuites au plafond, d’artiste covidés et de voisins fâché, d’augmentation des prix de tout, d’indexation et autres joyeusetés, de centaines de mails et de messages quotidiens et une découverte de ce qu’on appelle charge mentale …
Mais au bout d’un moment, à côté de mon enthousiasme, je me suis retrouvé face à une triste réalité : même avec la meilleure volonté du monde et en puisant au fond du fond de ses réserves, il est impossible de proposer une offre culturelle de qualité, avec une rémunération juste et à l’accès démocratique, sans aides extérieures.
On peut tourner ça comme on veut (et j’en ai passé des nuits blanches à le faire) c’est tout bonnement impossible en 2023. Même si le budget initial tenait la route, trop d’imprévus et une inflation galopante nous ont mis dans la merde.
Alors, oui, les aides publiques vont finir par arriver (normalement !), mais aujourd’hui on est à la limite de ne pas pouvoir rouvrir.
On pourrait (et on n’exclu pas la piste, on y travaille en étant prudent) chercher des gros sponsors ou dénaturer le projet en signant avec des brasseurs sans scrupules, mais j’ai encore la naïveté de croire que ce que je fais avec tout le soutien moral et l’investissement humain de mon équipe et de mon entourage, est d’utilité publique, que nous défendons une vraie vision de la culture et qu’on offre un lieu et un projet nécessaire à la ville de Bruxelles.
Alors encore une dernière fois : partagez notre appel aux dons, donnez ce que vous pouvez, venez voir des concerts, manger un croque-monsieur et une bière dans notre cour avant la Jam du mercredi, ce que vous pouvez, mais si vous tenez au projet, si vous pensez que c’est important d’avoir ce genre de choses dans votre vie, soutenez le !
Joaquim Caffonnette (sur FB)
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