LETTRE À CHRISTINE DEFRAIGNE par Pierre Heldenbergh

Ce matin sur les ondes de La Première j’ai entendu un extrait d’interview de Christine Defraigne, une des grandes personnalités libérales liégeoise. Elle s’y exprimait sur l’arrivée du leader d’extrême-droite Noa Pozzi au sein de la section MR de la cité ardente, grâce à la décision du seul Georges-Louis Bouchez.
L’extrait en question : « Je pense que l’on peut travailler au progrès de l’humanité, espérer que les gens changent, qu’ils aient une seconde chance. Sinon vous les condamnez à perpétuité avec une peine incompressible pour un gars de 20 ans à rester dans la case de l’extrême-droite. L’extrême droite je l’ai combattue toute ma vie, je déteste ce discours et donc s’il revient avec ses idées puantes, et bien il faudra le foutre dehors sans hésiter un seul instant. »
Ce début d’après-midi, je voudrais partager une petite lettre à ma « camarade » (désolé, je n’arrive pas à m’en empêcher ; – ) Christine Defraigne.

« Ma chère Christine.
Et ici c’est un vrai « chère » qui n’a rien à voir avec mon « cher Georges-Louis » qui ne m’est pas du tout cher. Ce gars-là me débecte…
Toi et moi nous nous connaissons un peu. Nous avons eu l’occasion de nous croiser régulièrement et je crois qu’on peut dire qu’on s’est chaque fois bien entendu, même sans forcément être d’accord. Et sur les mobilisations contre le racisme et la montée de l’extrême droite, nous étions quasi chaque fois côte à côte.
J’ai régulièrement apprécié ton côté frondeuse et ton indépendance face à des directions libérales toutes puissantes. CertainEs te considèrent même comme une anarchiste chez les libéraux.
Bon, calmons-nous avec les étiquettes, et laissons à Proudhon, Bakounine, Makhno et aux pirates des mers celle d’anarchiste ou de libertaire. Ce qui est certain par contre, c’est que tu n’as jamais eu ta langue dans ta poche.
Ici tu t’exprimes publiquement en faveur de la décision prise par le président omnipotent du MR pour « imposer » un nouveau membre à la section locale du MR. Le processus d’adhésion c’est votre popote interne.
Même si c’est quand même un peu particulier que l’avis des militantEs de base pèse moins que la décision d’un président. Les premierEs connaissent bien la tête de liste d’extrême-droite en question, puisqu’ilELLEs se sont frotéEs à lui pendant la campagne électorale il y a tout juste 6 mois. L’autre habite à 130 kilomètres de la cité ardente…

Alors oui, j’espère bien qu’on peut espérer que les gens changent et leur accorder une deuxième chance. Mais honnêtement, le faire seulement six mois après qu’il ait tenu des propos nauséabonds pendant sa campagne, c’est vachement rapide comme conversion, non ? Le gars qui se fait arrêter mort bourré dans sa bagnole, même s’il promet le lendemain matin qu’il a totalement changé, on lui suspend quand même son permis pendant une certaine durée, et même parfois on lui propose de faire un stage chez des accidentéEs de la route !

Georges-Louis Bouchez affirme que Noa Pozzi, le leader de l’extrême-droite liégeoise, a changé et qu’il promet d’adhérer aux valeurs du MR. Mais de quelles valeurs ont-ils parlé tous les deux dans les bureaux de l’Avenue de la Toison d’or ?
– de la position du ministre Pierre-Yves Jeholet sur les belges d’origine immigrée qui peuvent retourner dans leur pays s’ilELLEs ne sont pas d’accord ?
– des recommandations littéraires du ministre David Clarinval, pour un brûlot anti-transgenre ?
– des sorties ultra-bienveillantes de Georges-Louis pour le Vlaams Belang, pour Eric Zemour, pour Jordan Bardella, et maintenant pour Donald Trump ?
– de son regard plein d’enthousiasme pour l’armée israélienne qui font quelques victimes civiles de temps en temps, mais qui sauvent tellement la démocratie, ou encore de leurs services secrets qui ont des outils géniaux pour faire exploser des téléphones dans des pays étrangers ?
– de sa vision du soutien public à la culture et de l’intérêt d’avoir unE ministre qui aurait ces compétences ?
– de sa volonté de détricoter en quelques années un système de sécurité sociale construit depuis plus d’un siècle ?
Je m’arrête là, car chaque semaine cette liste s’allonge, et j’ai vraiment énormément de peine (sans rire du tout) pour les membres libérauxALES démocrates qui sont attachéEs aux valeurs de la démocratie et du bienvivre ensemble.
N’analyses-tu pas comme nous sommes quelques-unEs à la faire, une stratégie politique du clan Bouchez qui consiste à fleurter de plus en plus sur la ligne brune et nauséabonde du racisme et de l’extrême-droite ?
Le jour où les libérauxALES démocrates auront quitté le navire, dégoûté par la transformation de leur parti, peut-être n’aurons-nous toujours pas officiellement de partis d’extrême-droite en Wallonie, mais nous aurons alors un parti de droite-extrême soutenu par toute la fachosphère.
Je termine par la conclusion de ton interview : « L’extrême droite je l’ai combattue toute ma vie, je déteste ce discours et donc s’il revient avec ses idées puantes, et bien il faudra le foutre dehors sans hésiter un seul instant. »
Et si les premiers à foutre dehors n’étaient pas déjà à la présidence du MR ???

Bien à toi,
Pierre Heldenbergh »

Photo : Christine Defraigne dans ses fonctions protocolaires au Sénat en 2015.

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