19 août 2021
LE ”SILENCE” DES FÉMINISTES?
On l’entend monter sur les réseaux sociaux, et la rumeur ne fera qu’enfler : le ”silence” des féministes face à la tragédie que vivent les Afghans, et plus précisément les Afghanes, après la reprise du pouvoir par les talibans. Pire encore, un ”silence embarrassé” : étant sous-entendu que celles qui soutiennent le droit des femmes à porter le foulard dans nos pays occidentaux (ce qui ne représente d’ailleurs pas la position de toutes les organisations féministes, loin de là) sont nécessairement du côté des talibans en Afghanistan.
Il est bon alors de rappeler que la ”solidarité avec les femmes du monde entier” est un principe, un slogan et mieux, une pratique de bien de mouvements féministes (sachant que le féminisme est pluriel). La ”Marche Mondiale des femmes”, qui s’est déployée du Brésil au Congo, en est une belle illustration, tout comme les manifestations organisées chaque année contre toutes les violences faites aux femmes (voir la photo de la manifestation du 25 novembre 2018 à Bruxelles). Le ”silence” actuel n’est évident que pour ceux qui ne veulent pas entendre. N’est pire sourd… air connu (et ce n’est pas gentil pour les sourd‧es, que leur handicap n’empêche pas de s’informer). En France donc, où les accusations sont les plus virulentes, des associations féministes ont aussitôt réagi, comme on peut le voir par exemple ici et là. Les associations belges qui soutiennent les réfugiées et les personnes sans papiers depuis de nombreuses années ne devraient pas être en reste.
L’accueil plutôt que les bombes
Seulement voilà : pour défendre les femmes afghanes, les féministes ne proposent pas d’aller bombarder le pays ou d’y installer de nouvelles troupes d’occupation. En 2002 déjà, une féministe historique comme Christine Delphy exprimait tous ses doutes quant à une ”guerre pour les femmes afghanes”.
Non, ce que les féministes proposent et revendiquent, c’est un accueil organisé pour celles qui voudront fuir le pays, très loin contre une priorité à ”nous protéger contre les flux migratoires irréguliers importants” de Macron. Et cela, bien sûr, est plus difficile à entendre pour certains, qui préfèrent alors miser sur un supposé ”silence”. Il est par ailleurs amusant (si ce n’était aussi tragique) de constater comment une certaine droite se révèle soudain soucieuse des droits des femmes, quand il s’agit de défendre celles qui sont très loin (et qui sont priées de le rester) et de fustiger les féministes d’ici. Quant à l’Europe, elle montre toute l’étendue de son souci de défendre ces droits quand elle propose de soutenir l’accueil des réfugiées afghanes dans des pays aussi ”woman friendly” que l’Iran ou le Pakistan…
Lire aussi cette tribune, déjà signée d’un millier de femmes, connues ou non.
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