07 juin 2023
LA PISCINE, LA JOIE, LA CULPABILITÉ par Delphine Verstraelen (sur Facebook)
Delphine, assez active dans divers mouvements solidaires, cherchait sur Facebook une “piscine de jardin” d’occase pour ses ados.
Elle a surtout reçu une pluie d’insultes en commentaires et en messages privés.
Cette histoire raconte pas mal de choses sur la violence des réseaux sociaux, avec ses mécanismes de lynchage, et sur la difficulté d’articuler une certaine conscience écologique et sociale avec la recherche des petits et des grands plaisirs de la vie.
Delphine y répond avec, je trouve, beaucoup d’empathie et de bienveillance.
Et je partage “en gros” son point de vue : créer du lien, de la joie, du plaisir, ce n’est pas “rien”. C’est même souvent l’essence de la vie – et ce pour quoi elle mérite d’être vécue (C.S.)
Pour celles et ceux qui n’ont pas suivi ( et c’est très bien comme ça de vivre dans la vraie vie)…
Nous cherchions une piscine tubulaire d’occasion (que nous avons probablement trouvée d’ailleurs dans une très sympathique famille recommandée par des amis/ famille sympas …).
Notre publication de recherche a suscité des polémiques inutiles.
Je vous copie ma réponse.
Histoire de n’avoir, peut-être pas, perdu mon temps à l’écrire.
Merci d’avoir l’intelligence de ne pas vous en prendre à Françoise, elle est bien assez adulte et engagée pour savoir ce qu’elle fera de son propos peut-être réactif, maladroit ?
Une personne à connaître quoi qu’il en soit !
« Françoise M. : Je me permets de copier coller votre commentaire ici pour y apporter ma réponse en « écho ». Votre commentaire, plus haut : « 10m³ d’eau pour rien…bravo. Désolée de vous avoir connue ».
Aïe aïe aïe.
A votre place, je serais plutôt désolée de ne pas avoir pris la peine d’essayer de me connaître vraiment car (mais peut-être me trompe-je ?), cela vous aurait probablement évité d’écrire ce commentaire binaire (le bien, le mal), jugeant et inutilement culpabilisant.
Vous sauriez en effet que ce genre de propos raccourcis me lasse au plus haut point.
Les questions, les conseils, les vrais échanges de points de vues, les maladresses et doutes exprimés, par contre, j’y suis très réceptive.
Je vous félicite, néanmoins, d’avoir eu le courage d’exprimer ce propos publiquement.
Je ne comptais pas prendre le temps d’y répondre avant que je ne reçoive en MP des insultes tout autant inappropriées (selon moi) qu’inutiles sur ce projet de piscine.
Sur ce réseau dit « social » les seules publications qui peuvent mettre tout le monde d’accord, ce sont les blagues…(Et encore, que dis-je, pour autant qu’elles soient au goût « bien-pensant » de la majorité, l’humour noir, le second degré, c’est risqué ).
Pour vivre heureux, vivons cachés comme disait l’autre…
Bah moi ce n’est pas tant que je ne sais plus le faire, c’est que je ne veux plus le faire…
Qu’on le veuille ou non, nous sommes tous reliés et le monde de demain ne sera différent que si chacun (plutôt que de cataloguer l’autre parce qu’il semble être différent, semble penser différemment, semble faire des choix différents) va vraiment, se rend disponible à la rencontre de cet autre.
Cette culture de l’immédiat, du zapping, du ghosting, n’aide pas, je le concède et le déplore.
Le fait d’avoir reçu d’autres messages que le vôtre en MP me « rappelle » que sur ce réseau « liker » (en + ou en -) c’est se positionner. Peu de personnes ont ce courage.
Sur d’autres sujets de justice sociale que je défends (comme vous d’ailleurs, je pense) c’est flagrant !
Il n’empêche que je vois régulièrement arriver des personnes « sorties de nulle part » proposer une aide, un soutien. Elles ne sortent pas de nulle part, elles ont vu passer des publications, des témoignages, elles ont fait du chemin puis, ont trouvé juste de s’engager d’une manière ou d’une autre , aussi minime semble-t-elle être, elle est énorme, parce que c’est le premier pas qui est toujours le plus difficile !
C’est donc pour tout cela que je prends la peine de vous répondre publiquement, en étant convaincue (combien de temps encore je ne sais pas…) que ce n’est pas une perte de temps de développer des points de vue sur ce réseau.
J’ai bien conscience de l’urgence climatique dans laquelle nous sommes !
Je suis, par ailleurs convaincue, et depuis longtemps, que la lutte pour le climat et la lutte pour plus de justice sociale sont intrinsèquement liées, interdépendantes.
J’ai juste envie de vomir quand j’entends « l’autre » là dans l’poste, qui (ne soyons pas dupes, hein ?) n’est que la face visible, le représentant d’un iceberg qui n’a aucun intérêt financier à ce que les choses changent, nous dire : « on va faire une pause » (en très raccourci aussi).
Je ne suis pas partisane de « l’excuse » d’attendre que d’autres se bougent pour me bouger, ni du coup du fait de me dédouaner en ne faisant pas ma part sous prétexte que de toute façon, ça ne servira à rien …
Probablement que j’essaie de faire ma part, parce que ça me donne l’illusion de me sentir moins impuissante face à l’ampleur du désastre climatique.
Très certainement parce que mes gosses devront vivre (ou survivre) dans ce monde que ma génération (en partie), et celles qui m’ont précédées ont créé, ou laissé créer.
Ce que je fais n’est pas parfait, mais c’est réfléchi (enfin la plupart du temps).
Cela fait des années que mes gosses me demandent une piscine.
Des années que je dis non.
Cette année, je me sens en mesure de leur dire oui, car je suis, enfin, en mesure d’investir dans des citernes d’eau de pluie.
Vous voyez, ce concept magique, naturel, très coûteux paradoxalement, qui permet d’alimenter les sanitaires, la machine à laver ainsi que le potager que pas à pas nous créons.
J’ai bien conscience que l’exemple que j’essaie de donner à mes gosses pour qu’ils puissent eux-mêmes poser des choix conscients, vaut tous les discours du monde, et sont autant de clés pour qu’ils puissent eux aussi faire des choix conscients.
Je ne suis pas parfaite, je ne me sens pas « obligée de me justifier », j’voudrais juste rappeler que les actions quotidiennes que nous sommes des milliers à faire comme : trier nos déchets, composter quand ça nous est possible, acheter local et/ou bio, ne s’habiller presqu’en seconde main, se déplacer un max avec les transports en commun (malgré tout…), ou à pied, à vélo dès que c’est possible, sont autant d’exemples précieux !
Perso, je ne crois plus aux mots, je crois aux actes (aussi petits semblent-ils.)
Je crois au fait de se concentrer sur le fait de faire sens.
Je crois à l’importance de cultiver la joie, et à l’inutilité de la culpabilité.
Cultiver sa joie, c’est cultiver sa puissance !
J’en reviens donc à votre expression : 10 m3 pour rien…
Bah non, pas pour rien, et dans le contexte global largement (trop largement) développé, pour vivre, entretenir les liens, rire en famille et plus largement en humains.
Vous resterez peut-être sur votre position première, et c’est ok pour moi.
Il me semble juste de vous remercier pour votre commentaire, sans lui probablement que je n’aurais jamais pris le temps de développer mon point de vue.
Delphine Verstraelen (sur Facebook)
NB : (1) the last but not the least , « on » nous propose plusieurs piscines sympas, des gens qui connaissent des gens que nous connaissons hein, pas les tristes sites qui devraient encourager le recyclage et la seconde vie des choses, mais qui ne gèrent pas les acheteurs foireux…
(2) ne nous trompons pas de combat !
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