HOT-DOG AU CPAS D’ANDERLECHT par Bernadette Schaeck

Ah ! Le mystère des traductions automatiques ! … Le saviez-vous ?
Au CPAS d’Anderlecht , “des animaux vivants sont distribués sans contrôle” par son président. C’est Theo Francken qui l’affirme sur Facebook ;-).
Donald Francken ne dit pas (encore) que le président et les bénéficiaires mangent des animaux tout crus et tout vivants (comme Trump prétend que « les étrangers » bouffent les chiens et les chats aux Etats-Unis…).
Francken signale aussi que le CPAS d’Anderlecht distribue des “salaires vivants” sans contrôle.
Là, on comprend un peu mieux la traduction low cost et « Google translate » de Francken : « leefloon » = « salaire vivant » = « revenu d’intégration » (en français).

Francken propose également quelques « solutions » : « Il est temps de fertiliser cette grange bruxelloise augias » et « Il faut que ça cesse [que le nouveau président du CPAS secoue les clients et vote dans la mosquée] » : « Nous devons mettre ces municipalités et les OCMW [Openbaar centrum voor maatschappelijk welzijn = CPAS] sous curé fédéral. »
Remplaçons donc la mosquée par un curé fédéral !
Désolée, c’est c.. mais ça me défoule.
Ceci dit, cette histoire prend une dimension incroyablement dangereuse !
Avant que nous soyons bouffés tout crus par les fachos et leurs laquais, nettoyons l’écurie d’Augias de la droite et de l’extrême-droite …

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Les problèmes au CPAS d’Anderlecht viennent aussi, je crois, d’une responsabilité collective qui devrait être mieux assumée :
Le CAS (Conseil de l’action sociale) est composé de 13 membres appartenant à 9 partis différents (si j’ai bien compté).
Le CSSS (Comité spécial du service social) est composé de 7 membres appartenant à 5 partis différents (si j’ai bien compté).
La commune et le CPAS sont dirigés par une coalition communale (la “majorité”) PS/Vooruit/Engagés/DéFi/Ecolo/Groen.
Il y a aussi les diverses autorités de tutelle, dont le SPP Intégration sociale (mais pas que).

Ce qui est révélé suite au reportage de la VRT (sur lequel il y aurait beaucoup à dire) devrait amener à relever un peu le débat :
– sur le huis clos (en Wallonie et à Bruxelles) qui fait que certains débats ne sont pas publics, et qu’il est impossible, dans ce cas, de faire des interpellations citoyennes au CAS ;
– sur le “secret des délibérations” qui est interprété (à tort ?) comme l’interdiction pour les conseillers de s’exprimer publiquement sur la politique menée par “son” CPAS dans le cadre d’un débat public ;
– sur l’absence ou la quasi absence de projets pour le CPAS pendant les campagnes électorales, alors que les résultats de ces élections détermineront pourtant la composition du CAS et la majorité que le dirigera ;
– la “schizophrénie” des conseillers CPAS et de leurs Fédérations, qui appartiennent aux mêmes partis que ceux qui prennent des décisions politiques (ou qui s’abstiennent d’en prendre) qui précipitent les CPAS dans des difficultés abyssales.

Il faudrait aussi évoquer la misère de l’assistance juridique gratuite (dite « pro deo ») ;
de l’absence de services de médiations dignes de ce nom (d’où le recours aux présidents de partis, pas qu’à Anderlecht, je peux vous l’assurer) ;
de la misère des quelques rares services juridiques de première ligne (on compte sur les doigts le nombre de salariés engagés dans ces structures pour la Région de Bruxelles) ;
de la misère des services sociaux qui tentent de régler les problèmes avec les CPAS (pas qu’avec celui d’Anderlecht, mais celui-là est quand même particulièrement énergivore) au détriment de leurs missions spécifiques (par exemple dans les Centres de santé mentale et les maisons médicales) ;
de tant et tant d’autres choses encore.
Et de la difficulté à mobiliser pour la défense des droits des bénéficiaires des CPAS… et pour leur amélioration… mais ça c’est encore autre chose !

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Quel est le rôle des présidents de CPAS dans l’attribution des aides urgentes ?
La loi de 1976 sur les CPAS (dite « organique ») est partiellement régionalisée.
C’est le cas de l’article 28 qui stipule que :

En Région wallonne :
« Le président peut, en cas d’urgence et dans les limites fixées par le règlement d’ordre intérieur du conseil de l’aide sociale, décider l’octroi d’une aide, à charge pour lui de soumettre sa décision au conseil à la plus prochaine réunion, en vue de la ratification. »

En Région de Bruxelles-Capitale :
« Lorsqu’une personne sans abri sollicite l’aide sociale du centre public d’action sociale de la commune où elle se trouve, le président doit lui accorder l’aide urgente requise, dans les limites fixées par le règlement d’ordre intérieur du conseil de l’action sociale, à charge pour lui de soumettre sa décision au conseil à la plus prochaine réunion, en vue de la ratification. Le président peut, en cas d’urgence et dans les limites fixées par le règlement d’ordre intérieur du conseil de l’action sociale, décider l’octroi d’une aide, à charge pour lui de soumettre sa décision au conseil ou à l’organe à qui cette attribution a été déléguée à la plus prochaine réunion, en vue de la ratification.”

Précisons que dans les « gros » et « moyens » CPAS, quand on dit « président », on entend « personne ou service qui a une délégation » pour accorder ces aides en fonction du règlement d’ordre intérieur voté par le CAS (Conseil de l’action sociale).
Accorder ces « aides urgentes » devrait permettre à des personnes et familles de ne pas crever de faim avant le premier paiement « officiel ». Il est donc regrettable que des CPAS n’appliquent que peu ou pas du tout cette disposition pourtant légale.

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J’ai été auditionnée à la Commission des affaires sociales mercredi pour l’aDAS, et j’ai assisté à une bonne partie des auditions (pas tout). Je reviendrai sur tout cela dès que je le peux.
En attendant, je mets la priorité absolue à répondre à toutes les demandes d’accompagnement de nombreuses personnes pour faire valoir leurs droits (pas qu’à Anderlecht, loin de là !).
J’ai pris un peu de retard avec toute cette histoire, la carte blanche (1), l’audition, plus une information hier à une cinquantaine de travailleurs sociaux (ça m’a fait du bien après l’audition puante de la veille)… je termine cela avant de faire toute autre chose.
Mais cela, ce n’est pas vraiment, ou vraiment pas, la préoccupation essentielle de tout ceux qui depuis une semaine s’agitent autour de cette question !

Bernadette Schaeck (de l’Association de Défense des Allocataires Sociaux).

(1) Ma carte blanche dans Le Soir : https://www.lesoir.be/638448/article/2024-11-26/cpas-au-dela-danderlecht-des-reformes-urgentes-et-necessaires

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