04 juillet 2024
CPAS : SE LOGER D’ABORD OU TRAVAILLER POUR RIEN ? par Bernadette Schaeck
« Housing first » ? Ou expulsion garantie ? Le « logement d’abord » ? Vraiment ?
Il a dû appeler la police hier pour éviter que sa propriétaire ne mette ses affaires à la rue et change la serrure. Nous savions que le risque était imminent.
Nous l’avions informé de la procédure en matière d’expulsion, et qu’au pire, il pouvait appeler la police. Ce qu’il a heureusement fait.
Demande envoyée au CPAS à la mi-mai. Impossible de savoir quel·le Assistant·e Social·e (AS) pourra traiter son dossier.
Tentative aujourd’hui de contacter la propriétaire pour lui expliquer que le retard de paiement est dû au retard de traitement du dossier par le CPAS. Et trouver le moyen de la faire patienter.
Encore du stress en quantité… Pour lui, surtout, qui a failli passer la nuit dehors, après une dure période sans-abrisme à laquelle il espérait enfin avoir pu mettre fin en trouvant un logement.
Ce ne sont pas quelques projets « Housing first » subsidiés par le Fédéral et les Régions qui mettront fin à la “crise du logement”, ni aux énormes problèmes pour avoir accès aux droits les plus élémentaires dans certains CPAS.
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Travaillent-ils ou ne travaillent-ils pas ? 18,3% des bénéficiaires perçoivent un RI (revenu d’intégration) en complément de revenus professionnels. Ils et elles travaillent, donc.
Dans un emploi à temps partiel, ou temporaire, de courte durée, ou irrégulier tel le travail intérimaire, saisonnier ou occasionnel.
Une partie d’entre eux – 56,7% – bénéficient de ce qu’on appelle « l’article 35 », à savoir l’exonération partielle des revenus professionnels. Ce qui signifie que le CPAS ne décompte pas l’entièreté du salaire, mais laisse un « bénéfice » de 303,42 (index au 01/04/2024).
L’autre partie – 42,7% – ne bénéficient pas de « l’article 35 ». Ils et elles travaillent en ne percevant rien de plus que le RI, donc rien de plus que s’ils ne travaillaient pas.
42,7%, c’est un pourcentage important ! Pourquoi ceux-là se voient-ils décompter la totalité de leur salaire ?
Parce que “l’article 35” n’est accordé que pendant trois ans (étalés sur six ans) ; qu’on n’y a droit qu’une fois dans la vie ; et qu’on n’y a droit que si on commence à travailler en étant déjà bénéficiaire du RI.
Si on travaille déjà au moment où la demande est introduite au CPAS, l’entièreté du salaire est décomptée du montant du RI.
Exemple : une femme, cheffe de famille monoparentale, travaille à mi-temps. Elle se sépare et demande le RI. Le CPAS lui décomptera la totalité de son salaire. Les femmes sont particulièrement défavorisées.
Alors que le même pourcentage de femmes que d’hommes travaillent en étant bénéficiaires du RI (17,1% contre 17,4%), 51,5% de celles qui travaillent bénéficient de « l’article 35 », pour 63,3% des hommes.
Les femmes bénéficiaires du RI qui travaillent le font donc plus souvent que les hommes “pour rien” : elles ne perçoivent pas plus que le montant du RI.
60% des femmes cheffes de famille qui travaillent ne bénéficient pas de l’article 35, contre 22% des hommes chefs de famille
A noter que ces chiffres ne prennent pas en compte les étudiant·es qui travaillent. En 2021, 62% travaillaient durant l’année et 55% pendant les vacances d’été.
Ces chiffres ne comptent pas non plus les bénéficiaires de l’ASE (Aide financière équivalente au RI), c’est-à-dire les personnes qui sont inscrites au registre des étrangers et non au service population. Elles sont aussi nombreuses à travailler.
Enfin, ces chiffres ne tiennent pas compte des personnes qui sont mises au travail par les CPAS en « article 60 » ou par une autre mesure d’ « activation » du RI : grosso modo, 10% des bénéficiaires.
Alors, question au duo Bouchez/Prévot : elles « travaillent » ou elles ne « travaillent pas », toutes ces personnes ?
Bernadette Schaeck, de l’Association de Défense des Allocataires Sociaux
Sources :
Focus n° 32 : les travailleurs faisant appel à l’aide du CPAS – SPP IS – chiffres 2021
Étudiants : Étude Tempera sur le PIIS étudiant
Philippe Malarme
Publié à 10:48h, 06 juilletQue faire ? Supprimer toutes ces allocations compliquées et les remplacer par un revenu universel distribué à tou.te.s ?